
…encore moins de faire un régime ou de vous sentir obligé·es de faire du sport pour compenser ces excès que vous estimez avoir fait durant les repas de Noël.
Vous n’avez pas fait d’excès, vous avez mangé à votre faim et en vous faisant plaisir, sans trier les aliments en catégories « bons » ou « mauvais », sans vous laisser obséder par le côté sain de vos assiettes. Et pour ça, la société veut à tout prix vous faire culpabiliser.
Depuis le début du mois de Janvier, je les vois partout; ces messages culpabilisants qui nous rappellent (surtout nous, les femmes) qu’avoir des kilos « en trop » est la pire chose qui puisse nous arriver. Sachant qu’il n’y a pas de kilos en trop car il n’y a pas qu’un seul et unique standard de corps auquel nous devons chercher à ressembler coûte que coûte – et que l’IMC que certain·es aiment brandir tel un bouclier est une vaste plaisanterie qui ne devrait surtout pas servir de référence – ce genre de messages me met en rogne.
A ces médias qui nous font croire qu’on n’est jamais assez, à ces pubs qui nous mettent des idées toxiques dans la tête, à ces articles de magazines qui essaient de nous convaincre que si on ne porte pas un S, voire un XS, tout en ayant de la poitrine et des hanches, mais une taille bien marquée et surtout pas de bourrelets/cellulite/vergetures… lâchez-nous.
Ce désir de nous formater (et nous créer des complexes dès le plus jeune âge) est extrêmement destructeur.
Ce fut – entre autres – le fait d’entendre des remarques (parfois de mes proches, ce qui est encore pire) sur mon poids ou me prendre des « Tu manges bien à la cantine, dis donc » sur un ton soi-disant blagueur, qui m’a entraîné dans une spirale infernale de TCA (dont des crises de boulimie vomitive et un trouble de dysmorphie corporelle…).
Ça a commencé alors que j’avais 12 ans et plus le temps passait, plus je développais une obsession pour les calories, mon poids, mes mensurations. Je me comparais de plus en plus aux autres filles, je sautais des repas, je refusais tout ce qui était sucré sous prétexte de ne plus avoir faim (alors que j’étais simplement terrifiée de manger ce que l’on qualifie de « mauvaise » nourriture). J’ai dû essayer au moins une dizaine de régimes différents; bien évidemment aucun n’a jamais suffi pour que je retrouve confiance en moi, et plus je me créais des restrictions, plus je me jetais ensuite sur la nourriture « interdite » en cachette.
J’étais malade, sans oser l’admettre. Je me souviens de la haine avec laquelle je regardais mon corps, de ces fois où je pinçais le gras de mon ventre de toutes mes forces, comme pour me punir de l’avoir encore, malgré les régimes, malgré les exercices physiques que je m’imposais, jusqu’à l’épuisement.
Il m’a fallu des années pour commencer à me libérer de ces troubles qui me gâchaient la vie, m’empêchaient de profiter des repas en famille, de sortir au restaurant avec des amis, de vivre tout simplement.
On ne guérit jamais des TCA (car oui, c’est une maladie) on apprend simplement à vivre avec et à faire taire cette petite voix, à ne plus la laisser nous contrôler, même les jours où elle revient.
Encore aujourd’hui, il m’arrive d’avoir des pensées très négatives au sujet de mon corps, de regarder des vielles photos de moi et de me dire que j’étais bien avant. Et puis je me rappelle de mon état physique et psychologique lorsque ces photos ont été prises, de mes vertiges, de la fatigue permanente, de la frustration et de tous ces soirs où je pleurais parce que je n’étais jamais assez mince à mon goût… et je réalise que pour rien au monde je ne voudrais revivre ça.
Je n’ai jamais été aussi heureuse, épanouie et bien dans ma peau, que depuis que j’ai jeté la balance, arrêté de me laisser berner par les promesses des thés « detox/minceur » (qui, juste pour info, sont des laxatifs…) arrêté de compter les calories et d’accorder de l’importance aux petites chiffres ou lettres qui figurent sur les étiquettes de mes vêtements.
D’ailleurs, les tailles de vêtements pourraient faire l’objet d’un article à part, tellement il y a des choses à dire là-dessus: ces malheureux chiffres ou lettres, avaient le don d’ébranler ma confiance au point où je refusais de mettre le pied dans un magasin de vêtements, honteuse de devoir dire à la vendeuse que le M était trop serré, comme si c’était le plus grand échec de ma vie.
Il faut pourtant savoir que les marques taillent n’importe comment (je me retrouve avec des vêtements d’il y a plusieurs années en taille 38 qui me vont très bien, alors qu’aujourd’hui même un 40 ne me va plus dans certaines marques… bizarre non?). Il s’agit une fois de plus, d’une stratégie marketing visant à détruire notre confiance en nous.
C’est quelque chose de récurrent chez les marques de fast-fashion – comme H&M et Zara – où les tailles ne vont d’ailleurs jamais au-delà du 42 (qui s’avère souvent être un petit 40 quand on compare avec d’autres marques, vous voyez le souci?).
(Note: s’il vous fallait une raison de plus pour bannir ces marques et arrêter de leur donner votre argent, outre l’impact désastreux sur l’environnement et les conditions de travail qui n’ont rien d’éthique, vous l’avez)
Arrêter de faire une fixette sur la taille de mes vêtements a été dur mais libérateur. Si parfois, il m’arrive de penser « Je prends cette taille là maintenant? » (car encore une fois, je suis humaine et il y a des jours où certaines réflexions toxiques refont surface) je me concentre sur mon état physique et mental, surtout comparé à il y a des années.
J’ai tellement plus de force, d’endurance et d’énergie, depuis que j’ai dis adieu aux detox et régimes et que j’ai arrêté de penser que pour avoir de la valeur, je devais absolument rétrécir mon corps.
J’ai petit à petit retrouvé un rapport plus sain avec la nourriture, en apprenant à écouter mes besoins mais aussi mes envies, en arrêtant de me priver et de diaboliser certains aliments; en fin de compte, tout ça m’a également permit de retrouver confiance en moi. J’ai compris que je ne devais pas chercher à tout prix à avoir le contrôle absolu sur mon corps, qu’il savait parfaitement ce dont il avait besoin et que surtout, il était normal qu’il évolue et change au cours de ma vie.
Nous ne sommes pas toutes et tous censé·es faire la même taille à 16 ans qu’à 36 ans; et bien sûr qu’il existe des exceptions, que certain·es gardent la même morphologie au fil des années. Il y a encore quelques années, j’enviais ces filles, en pensant que c’était la norme et l’idéal auquel je devais aspirer. Mais le fait est qu’il n’y a pas de norme. Il n’y a pas de corps idéal, qui aurait plus de valeur qu’un autre.
J’ai également compris que ce n’était pas une question de santé, derrière laquelle il m’arrivait de me réfugier par le passé. Qu’il existe encore tout un tas de préjugés toxiques et d’idées reçues qu’on doit apprendre à déconstruire (quand on pense qu’une personne grosse est en mauvaise santé, par exemple). Et que dans tous les cas, la santé des autres ne nous regarde pas. Personne n’a à vous faire de remarques sur votre physique ou vous donner des conseils non sollicités en prétendant être inquiet pour votre santé.
Quand j’étais adolescente, j’avais des amies minces qui mangeaient des burgers et des pizzas tous les jours, qui fumaient et ne faisaient pas de sport, mais personne ne leur parlait de leur santé. Pourquoi? Parce qu’on vit dans une société profondément grossophobe.
Je réalise en me relisant que cet article – qui n’était encore une fois pas du tout prévu – peut sembler brouillon, car je l’ai écris sous le coup de l’émotion. Le sujet des TCA reste encore compliqué à aborder pour moi, même si j’y travaille tous les jours.
Néanmoins, j’ose espérer qu’il fera réfléchir celleux qui sont persuadé·es de devoir faire des régimes ou des cures detox, ou celleux qui pensent que la taille de leurs vêtements ou un chiffre sur la balance peut influencer leur bonheur d’une quelconque façon. La vie, c’est maintenant. Ne laissez personne vous faire croire que vous avez besoin de changer avant d’en profiter et d’en savourer chaque seconde.
You feeling like shit about your body translates into profits for the diet industry. Accepting your body is a big f*ck you to an industry that thrives off making you feel insecure and selling solutions that don’t work. (Krista Murias @ Instagram)

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