J’ai commencé à prendre la pilule à 16 ans. Elle m’a été prescrite par une dermatologue pour traiter mon acné. J’étais trop jeune à l’époque, trop naïve pour ne serait-ce que penser à me renseigner davantage sur ce qu’était réellement ce petit cachet rose que je prenais tous les jours. J’étais convaincue, au fond de moi, que tous les médecins savaient forcément ce qu’ils faisaient, et que je pouvais donc leur faire confiance, sans me poser de questions. Cette pilule – du nom de Lumalia – était pourtant un générique de la Diane 35, « soupçonnée » d’être aujourd’hui comme la plus dangereuse sur le marché et d’être responsable de plusieurs décès…
Une fois sous pilule, mes problèmes de peau se sont arrangés (sans non plus disparaître comme par magie; je continuais d’avoir des boutons douloureux de temps à autre) mais rapidement, des effets secondaires sont venus ternir le tableau. Moi qui était soulagée de voir ma peau aller mieux, je ne me doutais pas de ce qui m’attendait. Au début, j’ai commencé à prendre du poids. Rien de bien grave, me direz-vous. Le fait est qu’en tout et pour tout, après 4 ans de pilule, j’ai pris pas moins de 12kg. Au bout de deux ans, j’étais dans un état à la limite de la léthargie; fatigue chronique, somnolence, dépression… Je n’avais envie de rien faire. Me lever du lit le matin était un supplice. Je souffrais aussi de maux de tête de plus en plus fréquents.
Poussée par mes proches, j’ai fini par consulter un médecin qui m’avait alors prescrit une prise de sang. Mes analyses n’avaient pas l’air si mauvaises que ça, si ce n’était le taux d’une hormone trop élevé, qui me valut des questions très étranges : « Votre poitrine vous fait-elle mal? Avez-vous déjà observé ce qui pouvait ressembler à des montées de lait? » Il y avait également mon niveau de cholestérol qui était dans le rouge, ce que je peinais à comprendre car j’avais une bonne alimentation. Et puis je n’avais que dix-sept ans. Ce jour-là, je suis ressortie du cabinet encore plus perdue qu’avant, avec une ordonnance pour une IRM car mes céphalées + les résultats de mes analyses semblaient avoir inquiété le médecin. Je suis allée faire cette IRM sans penser une seule seconde que j’allais obtenir une explication concernant mes maux de tête, et ce fut la douche froide. Une grosseur dans le cerveau, toute petite, mais bien présente. Plein de termes scientifiques, une tâche miniature désignée sur l’écran. Une impression d’être dans un épisode de Grey’s Anatomy, mais d’avoir écopé du mauvais rôle; celui de la patiente totalement désorientée, avec les mains moites et un sourd bourdonnement dans les oreilles. Je devais revenir, faire surveiller cet étrange point sombre, attendre d’être fixée. Attendre qu’on décide quoi en faire. Je n’y ai remis les pieds que des mois plus tard, après avoir lu tout ce que je pouvais lire sur les effets de la pilule et après l’avoir arrêtée du jour au lendemain. J’en ai bavé; mon acné était revenue en force, mon cycle menstruel était une catastrophe. Mais lorsque j’ai fini par refaire cette IRM, le pas-si-aimable monsieur qui m’a reçu au moment des résultats a cligné des yeux pendant cinq bonnes minutes en lisant la lettre de mon médecin, son regard passant du scan de mon cerveau affiché sur son ordinateur, à la lettre entre ses mains, avant d’affirmer « Je ne comprends pas pourquoi vous êtes venue. Il n’y a rien. »
Alors est-ce que la petite tâche sombre s’est-elle estompée toute seule? Ou a-t-elle disparu une fois que j’ai choisi d’arrêter la pilule? Je ne sais pas. Le fait est que mon taux de cholestérol lui aussi était revenu à la normale, alors que deux mois plus tôt, une gynécologue m’avait sèchement rétorqué que la pilule ne pouvait pas faire monter le cholestérol (et qu’à un moment donné, je devais choisir si je voulais avoir des boutons ou des kilos en trop – réponse que j’ai obtenu parce que j’avais osé dire que je n’étais pas sure que cette pilule précise me convenait dû à tous les effets secondaires, dont la prise de poids).
La vérité est qu’après cet épisode plus que fâcheux, j’aurais préféré ne plus jamais la reprendre. J’avais vu les dégâts que ça pouvait causer. Mais trois ans après l’avoir arrêtée, alors que mon corps s’en était enfin plus ou moins remis, j’ai dû m’en faire prescrire une autre, cette fois-ci non pas pour traiter mon acné mais en tant que moyen de contraception. J’étais à ce moment-là dans une relation tout sauf saine (même si je ne le comprenais pas encore) et il me mettait la pression pour que je reprenne la pilule, affirmant qu’il n’avait pas l’intention de « se faire chier avec des capotes ». J’étais au pied du mur; si je ne voulais pas prendre le risque de tomber enceinte, je devais gérer ma contraception. J’ai donc commencé à prendre Jasmine et au début, tout se passait bien. Pas de prise de poids, pas de migraines; mon corps semblait bien la supporter et j’étais soulagée. Et si le problème n’avait jamais été la pilule en elle-même, mais juste une pilule précise que mon corps n’avait pas toléré? Les problèmes ont commencé plus tard. Crises de larmes sans raison, état proche de la dépression, poitrine douloureuse, libido aux abonnés absents. Si sous Lumalia, j’étais apathique et sonnée, sous Jasmine, chacune de mes émotions semblait exacerbée. Tous les jours, j’avais l’impression de vivre le SPM puissance dix. Je n’avais pas pris beaucoup de poids (surtout comparé à celle d’avant) mais mon corps me dégoûtait; je ne le reconnaissais plus. Je me sentais extrêmement faible, hypersensible, contrôlée par la fatigue et les émotions négatives, le corps entier endolori, comme un hématome sur pieds. J’ai fini par en faire part à mon copain actuel, qui a été compréhensif du début à la fin et m’a soutenu dans ma décision d’arrêter définitivement la pilule.
Alors oui, ce moyen de contraception présente aussi des avantages. On peut dire que c’est pratique (même si personnellement, je ne suis pas non plus d’accord sur ce point là). Pour certaines d’entre nous, la pilule est aussi le seul moyen d’atténuer les symptômes d’une endométriose. Il y a 50 ans, les femmes se sont battues pour y avoir accès – c’était le symbole d’un début d’émancipation. De là à dire que c’est une raison valable de continuer à la prendre aujourd’hui… (Je parle bien sûr de celles d’entre nous qui ont le choix) Je pense qu’à l’heure actuelle, il faut se battre afin d’obtenir une contraception éthique, naturelle et équitable, dont les hommes pourraient porter la responsabilité, autant que les femmes. Pour rappel, la pilule est classée cancérigène catégorie 1 pour les seins, le foie, le col de l’utérus et les voies biliaires par le CIRC, est soupçonnée de favoriser des embolies pulmonaires et des thromboses, est testée sur les animaux, et des essais cliniques de pilule destinée aux hommes ont déjà été stoppés car elle a été jugée trop dangereuse (elle provoquait entre autres : acné, nausées, douleurs, troubles de l’humeur ou baisse du désir… les effets secondaires « habituels » pour les femmes).
De mon point de vue, il existe aujourd’hui moyens de contraception moins nocifs pour la santé des femmes (même si encore une fois, cet article n’a pas pour but de juger celles qui prennent la pilule et à qui cette contraception convient). Pour ma part, après avoir hésité à me faire poser un stérilet en cuivre, j’ai finalement décidé de laisser mon corps tranquille; je ne voulais pas prendre le risque de voir le stérilet rejeté par mon corps, ou même risquer une pose douloureuse, des règles plus longues et abondantes que d’habitude… et puis encore fallait-il que ma requête soit acceptée, car aussi étonnant que cela puisse paraître, en 2018, des femmes nullipares se voient refuser la pose de stérilet par des gynécologues. Quoi qu’il en soit, pour le moment, après des années et des années à porter cette responsabilité sur mes épaules, je laisse l’amoureux gérer la contraception. Et après tout ce que j’ai enduré, cela fait du bien d’avoir un peu de répit. Si vous avez à vos côtés la bonne personne, elle sera tout autant impliquée et responsable, quitte à avoir recours à des méthodes telles que le préservatif, jugées comme peu pratiques dans un couple. Je pense par la suite me diriger vers la méthode des indices combinés (qui consiste à surveiller les changements corporels tels que la température, afin de déterminer la période fertile du mois).
Dans un prochain article (que je pense publier dans une ou deux semaines) je vous en dirai plus sur mon sevrage progressif et où je retracerai un bilan 2, 4 et 6 mois après le début du sevrage.

Coucou,
Moi aussi j’ai décider de ne pas avoir recour à la contraception, la pilule ne me réussissait pas plus que ça même si depuis 1an d’arret J’ai du mal à gérer les douleurs prémenstruelles^^.
Pour la contraception « naturelle » je m’aide de l’application « Flo » elle est gratuite et t’aide à savoir où tu te trouve dans ton cycle ainsi que ta période « à risque ». 1 an que je l’utilise et pas de grossesse non désiré a déclaré pour le moment 🙂
Arf j’avoue j’appréhende aussi les douleurs. J’ai lu beaucoup de choses positives sur le Livia, un petit appareil qui soulagerait les crampes.
Merci pour le conseil, je ne connaissais pas cette appli! J’ai que Ovia, mais je la trouve très complexe… j’irai voir Flo du coup 🙂